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Page de mars

 

Depuis quelques mois j’ai débuté comme médiatrice dans une école professionnelle, rôle que j’ai accepté avec confiance et curiosité tout à la fois. Les séances que j’ai eu l’occasion de mener jusqu’ici m’ont beaucoup touchée: elles m’ont permis de définir plus précisément les contours de la posture de médiateur, ses enjeux et ses opportunités.  Ces expériences m’ont également permis de mesurer une nouvelle fois à quel point la mise en mots peut s’avérer libératrice et la rencontre et découverte de l’autre différent de moi dans un lieu protecteur déterminant. 

 

La mission de médiateur est délicate, il doit être un accoucheur, un Socrate qui sait questionner, mais aussi mettre à nu les faces cachées les blocages et les peurs.(Chavanis, J-L & Gava M-J, 2014,  Outils et pratique de la médiation p. 65). Il est un facilitateur de communication, il stimule la réflexion des parties avec habileté et positivisme, sans intervenir sur le fond, ni proposer de solutions. Dès lors il est invité à une posture d’humilité où il démontre sa confiance dans le potentiel des personnes en présence de trouver leur solution.

 

La séance de médiation commence par la mise en mots : mise en mots de son vécu, de ses impressions, identification de ses émotions, prise de conscience progressive de ses projections et interprétations. La médiation a certes pour objectif premier la prévention ou résolution d’un conflit, mais il s’avère que le médiateur est aussi un éveilleur de conscience , il incite les parties à sortir de leur rôle de Victime du conflit, réveille leur libre-arbitre, les rend acteurs du changement désiré, acteurs de leur vie dans un processus de libération.( Idem p. 79) et c’est ainsi que les effets de la séance peuvent dépasser largement le cadre du conflit lui-même.

 

Le processus de médiation passe par la définition d’un cadre respectueux et le médiateur est au milieu, ses interventions servent avant tout à garantir une présence contenante et la possibilité à chacun de prendre sa place, en exprimant son point de vue, ses besoins, ses demandes. Et c’est là que la « magie » peut opérer car  « Le passage à l’acte parolier prend un effet aussi apaisant qu’une décharge motrice, on est apaisé par l’acte de parole, sécurisé par la compréhension attribuée à celui qui nous écoute. » (Cyrulnik B, 2010, Mourir de dire la honte p.36).

 

J’ai découvert ainsi un processus où chacun peut se découvrir mutuellement et se dé-couvrir, c’est-à-dire qu’il pose le masque et se montre tel qu’il est avec sa vulnérabilité et ses ressources… et je me dis que j’aurais pu bénéficier d’une telle démarche dans mon passé si j’avais su, si j’avais osé… et je me dis qu’il est important de faire connaître cette possibilité à large échelle :enfant,adolescent, employés et familles, que chacun puisse l’expérimenter et en faire bon usage pour le bien de tous. Car même si aucune solution n’est trouvée ou appliquée, reste que la personne aura raconté son histoire devant témoin. Le récit de l’agression fabrique une passerelle intersubjective construite avec les mots que l’on ose dire dire à quelqu’un qui ose les entendre. On peut nommer ce processus « restructuration coginitive » et on peut aussi dire que le remaniement de la représentation de soi évolue au gré des récits et des rencontres affectives. (Cyrulnik,B, 2010, p.109). Qu’on se le dise…

 

 

Evelyne Papaux